
Depuis deux ans, Sandra Lavalley souffre d’une maladie chronique qui impacte lourdement son quotidien professionnel. Grâce à la RQTH, elle bénéficie de plusieurs aménagements qui lui permettent de continuer à exercer son métier d’assistante du service client dédié aux professionnels, au sein du Crédit Mutuel. Découvrez son témoignage.
De quelle maladie chronique souffrez-vous ?
Suite à une tumeur qui se développait dans mon oreille, j’ai subi trois opérations qui m’ont laissé des séquelles. Depuis deux ans, je souffre à la fois d’acouphène et d’hyperacousie, c’est-à-dire d’une hypersensibilité à certains bruits, notamment du quotidien. Une voix criarde ou une sirène d’ambulance sont des bruits très agressifs pour moi. Ces maladies sont invalidantes et génèrent beaucoup de fatigue. Lorsque ma hiérarchie, qui a été au courant de mes opérations, a appris que je souffrais de ces maladies, elle m’a parlé de la RQTH. Ma première réaction a été la surprise : pour moi, un handicap était forcément visible et une personne handicapée était en fauteuil roulant. Je ne me considérais donc pas comme tel. Puis, à force de m’en parler, l’idée a fait son chemin et mon regard a changé sur le handicap. D’autant qu’après la dernière opération, j’étais en temps partiel thérapeutique qui ne pouvait pas durer éternellement. J’ai donc monté un dossier, sur les conseils du médecin du travail. Entre temps, j’ai également été mise en invalidité et il a fallu que je « digère » cette idée.
Exemples de maladies chroniques invalidantes reconnues par la MDPH* : fibromyalgie, sclérose en plaques, polyarthrite rhumatoïde, maladie de Crohn, diabète, endométriose, syndrome de fatigue chronique, migraine…
*Maison départementale des personnes handicapées (MDPH)
La RQTH vous a-t-elle permis de bénéficier d’aménagements spécifiques sur votre poste de travail ?
J’ai obtenu la RQTH en 2023, peu de temps après ma dernière opération de l’oreille. Grâce à elle, je bénéficie d’un ordinateur portable me permettant de travailler depuis chez moi, même si ce télétravail n’est pas prévu. Par ailleurs, j’ai droit à 6 demi-journées par an pour me rendre à mes RDV médicaux. Mon contrat de santé « prévention et bien-être » est également pris en charge par mon employeur, ce qui me permet de faire des séances de médecine douce. Je suis par exemple suivie par un ostéopathe car j’ai régulièrement les cervicales bloquées, du fait des crispations liées aux sifflements que j’entends. Au bureau, j’utilise un vieux téléphone à touche et je prends systématiquement mes appels en haut-parleur. Je partage mon bureau avec une seule collègue, qui est bienveillante. En parallèle de la RQTH, le fait d’être mise en invalidité m’a également permis d’adapter mes horaires de travail. Aujourd’hui, je travaille 3 demi-journées par semaine. L’avantage, c’est que je ne subis aucune perte de salaire par rapport au moment où je travaillais à temps plein.
Conseilleriez-vous aux personnes concernées d’entamer les démarches pour obtenir une RQTH ?
Oui, car cette dernière offre une véritable protection au travail. J’ai la chance de travailler dans un environnement de travail bienveillant, mais je pense que ce n’est pas le cas de tous les travailleurs handicapés. Obtenir la RQTH, c’est se prémunir de mises à l’écart, de licenciements… C’est également éviter qu’on vous attribue des tâches qui ne sont pas compatibles avec votre maladie. Typiquement, je sais par exemple que mon employeur ne m’imposera pas de longs déplacements. Il faut toutefois garder en tête que le dossier administratif pour obtenir la RQTH n’est pas si facile à monter. Il fait plusieurs dizaines de pages, c’est un vrai pavé ! Cela peut freiner certaines personnes. Pour ma part, j’ai été accompagnée par le cabinet PiDieM – un partenaire de mon employeur – pour m’aider dans cette étape. La consultante m’a par exemple aidé à préciser « mon projet de vie », une partie importante du dossier, où il faut expliquer l’impact de sa maladie sur son quotidien professionnel et ses besoins concrets. Sans cette aide précieuse, je me serai peut-être découragée.
Les trois avantages qu’offre la RQTH pour les malades chroniques :
- Mettre des mots sur sa maladie. D’après Anthony Gentelet, directeur du cabinet de conseils PiDieM, parler de son handicap – quel qu’il soit – sur son lieu de travail, c’est déjà se libérer d’un poids. « Les personnes en situation de handicap ont toujours peu que le regard des autres change sur elles et qu’elles suscitent de la pitié. Or, ce n’est pas le cas », constate-t-il. Faire les démarches pour obtenir une RQTH permet, par ailleurs, de changer les mentalités de ses collègues sur sa maladie. C’est donc participer, à sa petite échelle, à un projet d’envergure.
- Bénéficier d’aménagements. La RQTH permetaux malades chroniques de travailler dans de meilleures conditions, grâce aux aménagements de poste et aux formations qualifiantes auxquels ils peuvent prétendre (équipements, horaires, aides à la mobilité, bilan de compétences, validation des acquis de l’expérience…). Or, « ces aménagements ont un véritable impact sur le taux d’absentéisme, qui coûtent 4,4 % de la masse salariale en France », rappelle-t-il. Soit l’équivalent, pour les entreprises, de 800 euros par salarié, par an.
- Des jours de congé pour les RDV médicaux. Les personnes bénéficiant de la « RQTH » n’ont pas besoin d’utiliser leurs jours de congés ou leurs RTT pour honorer leurs obligations médicales. Les entreprises octroient aux salariés reconnus handicapés des jours d’absences supplémentaires pour consulter leurs médecins, leurs spécialistes… « C’est un avantage qui permet aux personnes en situation de handicap de continuer de bénéficier de vacances, donc de travailler dans la durée, au même titre que les autres », précise Anthony Gentelet.
Par Aurélie Tachot