Aidance : dans le quotidien d’Isabelle, salariée de La Poste et mère d’une fille lourdement handicapée 

Âgée de 53 ans, Isabelle Contamine est à la fois aidante pour sa mère, récemment placée en EHPAD et pour sa fille de 21 ans, lourdement handicapée. Grâce aux aménagements proposés par son employeur – le Groupe La Poste – cette responsable du déploiement des offres et des contrats parvient aujourd’hui à combiner ces deux vies. Témoignage. 

Vous faîtes partie des 5000 salariés considérés comme « aidants » au sein du groupe La Poste. A qui venez-vous en aide au quotidien ?  

Je suis aidante à double titre : à la fois pour ma mère, qui, du fait de sa perte d’autonomie, vit désormais dans un EHPAD ainsi que pour ma fille de 21 ans. Chloé est atteinte d’une anomalie génétique, dûe à une délétion du chromosome 5. Cette « maladie du cri du chat », elle l’a depuis sa naissance et lui génère un handicap psycho-moteur. Depuis 2023, elle ne vit plus avec mon mari et moi au sein de notre domicile. Du lundi au vendredi, elle est dans un centre d’activités de jour qui intègre un foyer de vie. En journée, elle réalise des activités sportives, culturelles, artistiques… Le soir, elle dort au sein du foyer et est aidée par les équipes en place pour ses gestes du quotidien (toilette, coucher…) Elle revient ensuite à la maison chaque week-end. Étant donné son handicap elle ne pourra certainement jamais travailler, ou au mieux dans un ESAT à mener des tâches répétitives. 

Comment ces deux situations impactent-elles votre quotidien professionnel ?  

L’an dernier, ma mère a trouvé une place dans un EHPAD non pas à Paris, où nous vivons, mais en province, à Angoulême. Dès qu’il y a des rendez-vous médicaux, je m’y rends pour l’accompagner. Ce sont souvent des RDV en semaine, si bien que l’EHPAD m’a installé un petit bureau pour que je puisse télétravailler dans sa chambre, à ses côtés. Il m’arrive par exemple de suivre des réunions à distance, depuis l’EHPAD. Comme je suis investie dans l’établissement, au sein du conseil de vie sociale, je m’y rends également régulièrement pour rencontrer les équipes, faire remonter des difficultés identifiées par les familles… Lorsque je mène des réunions pour le compte de ce conseil de vie sociale, je pose un jour d’absence. En tant qu’aidante certifiée, c’est-à-dire reconnue par mon employeur, je bénéficie de 4 jours d’absence possible par an : 3 jours pour mon statut d’aidant et 1 jour à partir du 2e aidé.  

Votre fille nécessite-t-elle, elle aussi, votre présence durant la semaine ?  

Oui, car elle a, elle aussi, des rendez-vous médicaux de suivi auxquels j’assiste systématiquement. Aujourd’hui, notre quotidien est toutefois moins difficile que lorsqu’elle était plus petite. Quand elle était au sein d’un Institut médico-éducatif (IME), elle finissait par exemple ses journées à 16h30. Une babysitter prenait ensuite le relai jusqu’à mon retour à la maison à 19h30. Parfois, j’avais la chance de tomber sur des étudiants en psychologie. Parfois, je devais recourir à des organismes de garde non spécialisés, ce qui a malheureusement abouti, une fois, à un acte de maltraitance à l’encontre de ma fille. À cette époque, j’avais donc davantage recours au télétravail même si, avec le recul, ce n’était pas évident de travailler à ses côtés car elle me sollicitait beaucoup… Je bénéficiais également d’autorisations spéciales d’absence en tant que parent d’enfant en situation de handicap. 

En 2018, La Poste a signé un accord d’entreprise sur le sujet des aidants, permettant à ces derniers de bénéficier d’aménagements. En profitez-vous ? 

Oui ! Outre les jours d’absence et la possibilité de télétravailler, je bénéficie d’autres avantages. Je pense notamment à une plateforme téléphonique, qui permet de renseigner les aidants sur de nombreux sujets comme les aides qu’ils peuvent toucher ou les démarches qu’ils doivent effectuer. L’Association des familles d’enfants handicapés (AFEH) de La Poste m’a par exemple accompagnée sur le plan juridique lorsqu’aux 18 ans de ma fille, j’ai dû la mettre sous tutelle. Pour la garde de ma fille à domicile, je bénéficiais également de chèques emploi services, d’une aide de 160 euros… Au final, grâce à l’ensemble de ces avantages et aménagements, mon employeur me permet non seulement de répondre à mes préoccupations quotidiennes (donc de rester concentrée sur mon travail) et d’avoir une vie de famille relativement équilibrée. 

Arrêter de travailler, c’était une option pour vous ?  

Je ne voulais pas vivre en permanence avec le handicap de ma fille. J’avais envie d’exister en tant que femme, et non pas uniquement en tant qu’aidante. Mon travail a toujours été une fenêtre de respiration. Je me suis d’ailleurs sentie investie d’une mission : celle de parler du handicap à mon réseau de collègues, pour les sensibiliser aux difficultés rencontrées, briser leurs idées reçues… J’ai la chance de travailler pour une entreprise bienveillante, au sein de laquelle les managers savent écouter. À l’époque, lorsque j’ai annoncé à mon N+1 que je m’occupais de ma fille handicapée, il a fait preuve de beaucoup d’écoute. Il m’a d’emblée proposé d’organiser mon temps comme je le voulais. Ma pause déjeuner était donc plus courte et le soir, lorsque ma fille était couchée, je réalisais mes reportings depuis mon domicile. Ça m’a enlevé une sacrée épine du pied ! 

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