Etat de santé

Congé menstruel : une nouvelle proposition de loi en France

Alors que certains pays à l’image de l’Espagne l’expérimentent depuis plusieurs mois, le congé menstruel fait l’objet d’une proposition de loi en France. S’il est voté à l’Assemblée, il pourrait entrer dans le Code du Travail et devenir une norme au sein des entreprises hexagonales.

Qu’est-ce qu’un congé menstruel ?

Le congé menstruel est une période durant laquelle une femme souffrant de douleurs menstruelles peut prendre des jours de congés.

En France, le sujet prend de plus en plus d’ampleur à mesure que les entreprises réalisent des expérimentations auprès de leurs salariées. Il n’existe toutefois aucune statistique « officielle » sur le nombre de femmes souffrant de règles douloureuses.

Selon une étude menée en 2021 par l’IFOP pour Intima, une française sur deux souffrirait de dysménorrhées. Un taux qui s’élèverait même à 60 % chez les jeunes âgées de 15 à 19 ans. L’endométriose toucherait, quant à elle, 10 % des femmes en France. 

Si le sujet fait actuellement couler beaucoup d’encre, c’est parce que l’Espagne est devenue, en février 2023, le premier pays européen à instaurer le congé menstruel. Une décision qui a encouragé un groupe d’élus PS et de députés écologistes à déposer, en mai 2023, une proposition de loi visant à inscrire le congé menstruel dans le Code du Travail.

Ailleurs dans le monde – essentiellement en Asie – ce congé s’est déjà frayé un chemin. Au Japon par exemple, le droit au congé menstruel est inscrit dans la loi depuis 1947 tandis qu’en Indonésie, les femmes peuvent prendre un ou deux jours de congés payés en début de cycle menstruel depuis 2003. 

Proposition de loi sur le congé menstruel en France : quelles sont les mesures prévues ?

Déposée en mai dernier par les députés EELV et Génération.s, la proposition de loi entend généraliser le congé menstruel à l’échelle de toutes les entreprises et de la fonction publique. Elle prévoit l’instauration, pour les salariées et agentes de la fonction publique victimes d’endométriose ou des règles douloureuses, un congé menstruel de 13 jours par an, sans jour de carence et sous réserve de la présentation d’un certificat médical. Ces 13 jours d’arrêts correspondent au nombre de cycles menstruels d’une femme sur une année.

Le texte de loi prévoit que cet arrêt pourrait être renouvelé une fois par an à titre exceptionnel « dans les cas les plus graves. »  

Le projet de loi, qui serait entièrement financée par la Sécurité Sociale, prévoit également un « aménagement du poste » de l’employée. Concrètement, les entreprises devraient être obligées de faciliter le télétravail, de garantir un accès « à des sanitaires adaptés » et de proposer des protections pour lutter contre la précarité menstruelle.

Pour éviter toute discrimination, les salariées concernées pourraient déposer leur certificat médical sur la plateforme Ameli. Cette dernière génèrera automatiquement l’arrêt de travail. Il leur suffira ensuite de transmettre ce document à leur employeur pour bénéficier de jours de congés pour « menstruations incapacitantes ». 

Ces entreprises françaises qui ont mis en place un congé menstruel :

En France, un nombre croissant d’entreprises – à l’image de La Poste – sont en cours de réflexion sur le sujet des cycles menstruels. Certaines ont même sauté le pas. Parmi elles, il y a notamment : 

  • Carrefour : Depuis l’été 2023, les employées souffrant d’endométriose et reconnues comme travailleuses handicapées (RQTH) bénéficient d’un droit de 12 jours d’absence par an, financés par l’enseigne de distribution. 
  • L’Oréal : en janvier 2023, la direction du groupe et ses représentants syndicaux ont signé un accord visant à accorder 3 jours d’absences par an, aux salariées souffrant d’endométriose, dont la maladie a été diagnostiquée, sur présentation d’un justificatif médical. 
  • La Collective : cette SCOOP a été la première entreprise à proposer, dès 2021, à ses salariées souffrant de règles douloureuses un jour de congé supplémentaire par mois. Ce jour n’est pas considéré comme un arrêt puisque le salaire dû aux employées est intégralement versé. 
  • Louis : depuis le 8 mars 2022 l’entreprise de mobilier propose, elle aussi, une journée de congé rémunérée par mois aux femmes ébénistes souffrant de règles douloureuses. Aucun justificatif n’est demandé et le congé peut être pris au pied levé, sans obtenir l’accord du manager. 
  • La Mairie de Saint-Ouen : depuis mars 2023, 2 jours de congés par mois sont octroyés aux agentes souffrant de règles douloureuses. Elles peuvent également choisir le télétravail ou aménager leur planning sans qu’aucun jour de carence ne leur soit décompté. 

« Venir travailler quand on souffre, c’est contre-productif ! »

Xavier Molinié, DRH de Goodays

“Depuis le 1er mai 2022, les salariées de Goodays bénéficient d’un à trois jours de congé par mois lorsqu’elles souffrent de règles douloureuse ou d’endométriose. Cette initiative est née d’une réflexion plus globale que nous avons menée sur la souffrance au travail. Nous avons à coeur d’offrir à nos salariés de bonnes conditions de travail. Or, venir travailler quand on souffre, c’est contre-productif ! Sur les 40 femmes présentes dans notre effectif, 10% bénéficient de ce jour de repos 100% rémunéré, mais pas de manière systématique tous les mois. Il leur suffit juste de le signaler à leur manager ou à moi-même pour en bénéficier. Nous n’exigeons aucun certificat médical pour ne pas ajouter de complexité à une événement déjà douloureux. C’est une mesure qui a été bien reçue en interne car la parole était déjà libérée sur le sujet. Même si ce n’était pas l’objectif, cette initiative a également des bienfaits en matière de fidélisation et d’engagement des équipes. En effet, elle fait émerger, chez elles, une forme de reconnaissance.”

Xavier Molinié, DRH de Goodays